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« Il est possible de traverser le cancer »

24.05.2018

 

Daniela Mossenta sort à peine d’une année de traitement suite à un cancer du sein. Elle insiste sur l’importance d’être soutenue par des proches et de s ’ inve s t ir dans sa guérison. Rencontre

Les cheveux qui repoussent, le regard déterminé, Daniela Mossenta dégage la sérénité de ceux qui ont pris la mesure de la fragilité de la vie. A 67 ans, cette ancienne secrétaire de direction sort à peine d’une année de traitements pour un cancer du sein. Installée dans le séjour de sa maison de Neuchâtel avec une vue magnifique sur le lac et les Alpes, elle se souvient très précisément de cette journée où tout a basculé. C’était le 25 novembre 2016. Un jour d’automne ensoleillé.

«La mammographie de contrôle prévue dans le cadre du programme de dépistage a révélé des taches dans mon sein gauche, raconte-t-elle. Elles ont été confirmées par l’échographie qui a suivi aussitôt. La radiologue m’a dit d’attendre un moment. Là, la crainte du pire se profile. J’attends en respirant profondément pour ne pas laisser la panique m’envahir. Quatre soignants entrent à pas feutrés, se rangent en ligne. Je comprends. «Madame Mossenta vous êtes atteinte d’un cancer». A ma question: Est-ce grave? J’entends: «d’autres analyses sont nécessaires avant de nous prononcer». Abasourdie, je sors de l’hôpital comme un robot. Anéantie, je vais tout de même prendre le repas convenu de longue date avec une amie chère».

Pour Daniela, l’épreuve est d’autant plus difficile qu’elle lui a fait revivre, dans sa chair, la maladie de son fils Leandro, décédé en 2010 à 29 ans d’une leucémie. «Cela m’a fait énormément souffrir. Heureusement, j’ai eu le soutien de mes deux autres enfants, Lisandro et Leana. Sans eux, sans leur amour inconditionnel, les choses auraient été tout autre. Ils ont été ma motivation.»

La Neuchâteloise est arrivée au terme de son traitement le 11 octobre dernier. Pour vivre au mieux «l’après», elle ressent un besoin frénétique de créer. Elle peint beaucoup, comme pendant son traitement. Elle expose du 28 novembre au 12 décembre 2017 en compagnie d’autres artistes au Péristyle de l’Hôtel de Ville de Neuchâtel. «Pour montrer qu’il est possible de traverser le cancer», Daniela a demandé au photographe Guillaume Perret de faire une série d’images de son nouveau corps. «Dès le début, j’ai opté pour l’ablation complète. A mon âge, mon sein ne m’intéresse plus vraiment. Plus jeune, les choses auraient été différentes. Je ne voulais pas prendre le risque de devoir subir une deuxième intervention chirurgicale. Ma cicatrice me plaît, j’aime mon asymétrie.»

Daniela Mossenta souhaite aussi partager son itinéraire thérapeutique qu’elle a personnalisé au maximum, en ayant aussi recours aux médecines douces. «Cela a porté ses fruits. Attention: je ne l’ai pas mené mon traitement seule dans mon coin. J’en ai toujours parlé aux médecins qui m’ont suivie. La Dresse Chevènement, du Centre du sein de l’HNE, s’est montrée très adéquate. Je lui en suis reconnaissante.»

 

« Ma devise: m’investir au lieu de subir. Vivre le présent tel qu’il se présente »

 

Dans son parcours thérapeutique, Daniela a été particulièrement soutenue par sa fille Leana, chanteuse lyrique. «Elle a été extrêmement présente, passant beaucoup de temps chez moi entre deux contrats. Elle a été ma maman; j’en avais besoin. C’est elle qui m’a conseillé de faire un jeûne thérapeutique afin de libérer mon foie pour qu’il puisse éliminer au mieux la toxicité de la chimiothérapie. J’avais des menus prévus sur trois semaines. Ça m’a beaucoup aidée.»

Fatiguée après la première chimio, accablée par un mal de dos lancinant, c’est le moral dans les chaussettes que Daniela a commencé son traitement. Elle a pu s’en défaire grâce, entre autres, au drainage lymphatique, à l’hypnose afin «de libérer son thorax» des tensions accumulées. Elle a ressenti le besoin «d’investir du temps pour s’occuper d’elle-même». Elle a pratiqué la relaxation guidée par la voix de l’acteur Bernard Giraudeau couchée sur un tapis «Champ de Fleurs», des exercices de «Do-In» tous les matins pour l’éveil du corps, des exercices d’assouplissement des épaules selon le fascicule reçu au Centre du sein.

Daniela a également exercé une activité physique régulière. Sitôt après l’opération, elle a fait quotidiennement de longues promenades au bord du lac et s’est déplacée autant que possible à pied, en se ménageant des plages de repos. Avec l’accord de son oncologue, le Dr Bouzguenda, elle allait nager deux à trois fois par semaine, activité permise grâce à son bon état général.

«Ma trajectoire vers la guérison a été grandement facilitée parce que je n’ai pas eu à souffrir des maux dus aux divers traitements. Je ne veux même pas imaginer ce que ressentent les personnes qui n’ont pas ma chance. Depuis mon retour à domicile, je n’ai jamais pris de médicament antidouleur.»

Est-elle prête à faire face à une éventuelle rechute? «Ce n’est simplement pas possible, souligne-t-elle avec assurance. Grâce à tous les intervenants, mon système immunitaire est devenu extrêmement vigilant. Je veux vivre jusqu’à 95 ans.»