La bureaucratie hospitalière : un enfer ?

Par Olivier Plachta, directeur médical du RHNe.

Je suis par hasard tombé récemment sur un article au titre accrocheur : « L’enfer de la bureaucratie hospitalière ». Il s’agissait de l’interview du Professeur B. Granger de l’APHP (CHU d'Ile-de-France), auteur du livre au titre tout aussi fort : « Excel m’a tuer, l’hôpital fracassé »

Il y dresse son bilan pour le moins contrasté des évolutions de l’environnement institutionnel des soignant-e-s et des cadres hospitaliers/ères. En paraphrasant, il exprime le fait que, pour lui, désormais à l’hôpital :

« Tout est projet » : projet médical, projet de soins, projet managérial, projet social, projet d’établissement, projet financier, projet de pôle, projet de département, projet de service, projet de chefferie de service, projet pédagogique, projet des représentant-e-s des usagers/ères, etc ».
« Tout est rapport » : rapports annuels d’activité, bilans administratifs, rapports d’étapes, feuilles de route, plans stratégiques, boîtes à outils, états prévisionnels, plans locaux de santé, plans globaux de financement pluriannuels, stratégie de santé, pilotage de la transformation, etc ».
« Tout est indicateur » en faisant de la satisfaction d’indicateurs l’objectif du travail

Avec un paragraphe : «(…) La plus belle réussite de la bureaucratie, qui fait un tort considérable au monde hospitalier, est sans doute son aptitude à dilater le temps et à diluer les responsabilités. Ce qui dans la vraie vie prend une heure, prend dans la vie bureaucratique un trimestre, un semestre, une année (…)».

Les propos sont forts et font fi du de la complexification des organisations de soins et de la politique de santé. Ils expriment néanmoins le ressenti du terrain et qui affecte toutes les organisations de soins au niveau international. Nous ne pouvons comparer le système français au système suisse. Il reste toutefois incontestable que les hôpitaux font face à des augmentations de plus en plus rythmées des exigences administratives et légales, lesquelles font peser un tribut chaque année plus lourd sur les porteuses et porteurs de responsabilités dans les services de soins et médicotechniques.

Dans ce contexte, il est indispensable de veiller à ce que la charge et les actions administratives ne l’emportent pas sur les missions premières de l’hôpital. Ceci ne doit empêcher en aucun cas une gestion responsable des ressources. Les cadres de terrain restent assurément les mieux placé-e-s pour mener leurs missions en laissant les professionnel-le-s exprimer leurs qualités et leurs compétences, dans une organisation qui les soutient, dans un cadre bien défini et avec une gouvernance efficiente. Veillons à me pas désorganiser l’hôpital au nom d’une meilleure organisation.  L’enjeu est de taille pour nous comme pour tous les hôpitaux.