Martina Chyba: « J'avais l’impression de porter la planète entière »
Martina Chyba: « J'avais l’impression de porter la planète entière »
Date de publication : 26.11.2025
Lancées en mars 2025, les conférences Femmes-Phares ont rencontré un vif succès pour leur deuxième édition. Prochain rendez-vous: le 10 mars 2026.
Le 18 novembre, la soirée Femmes-Phares, organisée sur le thème « Charge mentale des femmes : et si on partageait ? », a fait salle comble à l’auditoire du site RHNe de Pourtalès. La PD Dre Susanne Renaud, médecin-cheffe du service de neurologie du RHNe, a ouvert la rencontre, rappelant que la charge mentale, c’est « comme jouer au ping-pong avec 20 personnes », entre travail, famille, organisation du quotidien et exigences du milieu hospitalier. Elle a souligné combien cette charge invisible pèse particulièrement sur les femmes, en plus de leurs responsabilités professionnelles.
L’interview croisée, animée avec brio par Juliette Jeannet, journaliste de la RTS, a ensuite réuni deux invitées aux vies professionnelles intenses : la Dre Sarah Piaget, médecin-cheffe adjointe aux urgences du RHNe, mère de deux enfants de 6 et 8 ans, et Martina Chyba, journaliste, chroniqueuse et écrivaine, proche aidante de sa mère pendant neuf ans et elle-même mère de jeunes adultes de 25 et 28 ans. «Je préviens les jeunes personnes dans l'audience, la charge mentale ne s'arrête pas quand vos enfants ont 18 ans ! », a d'emblée lancé cette dernière, provoquant les rires du public. Toutes deux se sont livrées sans réserve au sujet de la charge mentale et de ses conséquences sur le travail, le couple ou la santé.
Juliette Jeannet a rappelé que la charge mentale était un travail « intangible, incontournable et constant » visant à assurer « la satisfaction des besoins de chacune et chacun et la bonne marche de la résidence ». De la liste des courses aux rendez-vous médicaux des enfants, à l'organisation des cadeaux de Noël, ces tâches invisibles s’immiscent partout et peuvent avoir de lourdes conséquences sur la carrière et la santé.
Martina Chyba a évoqué deux moments où la charge mentale l’a submergée : la trentaine, période où « on vous demande de cartonner au travail, faire des enfants, si possible d'acheter un logement, d'être financièrement calé, d'avoir une vie sociale intéressante, une vie sexuelle extrêmement épanouissante et de continuer à faire du sport », puis la cinquantaine, cette « génération sandwich »: «Vous avez les premiers emmerdements de santé, les premiers emmerdements au travail où on vous fait comprendre que c'est bientôt l'heure de partir. Généralement, vous divorcez, vos enfants sont ados, vos parents sont vieux et malades, vos amours sont compliquées, votre libido est congelée... Moi, il y a un moment où j'ai pratiquement pété un plomb. J'avais l’impression de porter la planète entière. »
La Dre Sarah Piaget est revenue sur sa propre expérience : la réduction à 70 % après la naissance de son premier enfant, puis son année à 100 % en anesthésie pour compléter sa formation, durant laquelle son mari a choisi de rester à la maison. « Ce qui a été dur pour moi, c’était de lâcher complètement le rôle de celle qui gère tout », a-t-elle expliqué. Pour elle, la clé a été la communication dans son couple : « Cette charge mentale, elle est aussi dans nos têtes. Tant qu’elle n’est pas exprimée, posée sur la table, personne ne sait. »
Toutes trois ont insisté sur la nécessité de nommer cette charge mentale, de la partager dans le couple et dans les équipes, d’oser demander de l’aide et ont plaidé pour un droit à la déconnexion. La soirée a aussi ouvert la discussion sur les solutions à imaginer, tant au niveau des entreprises que de la société.
L'événement, coordonné et soutenu par la direction des ressources humaines, notamment, Consuela Buratti-Coï, ainsi que par la PD Dre Alix Stern, médecin-cheffe du département d’oncologie, et la PD Dre Susanne Renaud, s’est achevé par une séance de dédicaces du nouveau roman de Martina Chyba, « Un rendez-vous particulier » (Éd. Favre) et un apéritif convivial. Un moment qui a permis de prolonger les échanges, entre éclats de rire et confidences, et de se rappeler un sentiment partagé : on n’est pas seules et on a le droit de dire stop.
Voir la vidéo de la conférence ici.
PD Dre Susanne Renaud et PD Dre Alix Stern.