Vers une culture de l'erreur bienveillante
Vers une culture de l'erreur bienveillante
Par Emilie Nicodème-Paulin, médecin cheffe du Département d'imagerie médicale et directrice médicale adjointe
« Errare humanum est, perserverare diabolicum » (« L’erreur est humaine, persévérer est diabolique », locution latine attribuée à Sénèque) est un principe largement accepté dans la vie quotidienne. Pourtant, dès lors qu’il s’agit de soins et de patients, l’erreur se transforme en spectre effrayant de maux irréparables et de procédures judiciaires alimentant trop souvent les discussions dans les médias.
Ces 20 dernières années, l’approche suisse dans la qualité des soins a largement évoluée. En 2000, L’Office fédéral des assurances sociales publie un communiqué de presse faisant suite au rapport américain « To err is human », qui laisse supposer que 2000 à 3000 décès évitables se produisent chaque année dans les hôpitaux suisses en raison d’erreurs médicales. Depuis, de nombreuses mesures ont été prises pour améliorer la qualité et la sécurité en Suisse, la plupart touchant le stationnaire (programmes nationaux introduits par l’association Sécurité des patients Suisse, création de cercles qualité, listes de contrôle pour les procédures chirurgicales et l’anesthésie…) et commencent à s’exporter vers la médecine ambulatoire. Dans les hôpitaux, ces évolutions se sont traduites principalement par la création de groupes de travail ou de services autour de la sécurité, de cercles de qualité et sur le développement de CIRS (Critical Incident Reporting System) permettant de déclarer les évènements indésirables.
La culture de l’erreur n’est pas la culture du blâme ! Commençons par rappeler qu’erreur, faute et échec ne sont pas synonymes. L’erreur, c’est se tromper alors que l’échec survient lorsque l’objectif n’est pas atteint. Mais dans les deux cas, il s’agit de conséquences rarement intentionnelles. La faute est par contre un manquement à la règle. Nos erreurs nous renvoient donc simplement à notre humanité et n’ont de sens que si elles servent à l’apprentissage, l’innovation et la construction. Cette culture apprenante doit être favorisée dans toute institution par un engagement des instances dirigeantes, par l’implication de tous les collaborateurs mais également dans le rôle important des patients et des proches aidants.
Pour finir comme nous avons commencé, « l’homme sage apprend de ses erreurs, l'homme plus sage encore apprend des erreurs des autres » (Confucius). Donc partageons nos erreurs avec respect et empathie, pour les autres et pour nous-mêmes.